WESTERNS

14 octobre 2009 par - DVD

Une flopée de westerns vient de sortir tant en France qu’aux USA, à des prix très abordables.

L HOMME-DE-NULLE-PART

A tout seigneur, tout honneur, commençons par L’HOMME DE NULLE PART (JUBAL) de Delmer Daves qui coécrit le scénario. Ce premier volet d’une trilogie avec Glenn Ford est une transposition d’Othello dans les paysages somptueux de Jackson Hole où Rod Steiger joue (voire surjoue) Iago. J’ai revu le dvd américain et j’ai été très sensible à la grande variété des paysages, à la manière magistrale dont Daves les intègre à l’action, aux émotions des personnages. Il y filme pour la première fois l’émouvante Felicia Farr. Charles Bronson y est aussi spectaculaire que dans L’AIGLE SOLITAIRE. A découvrir.

LA-MISSION-DU-COMMANDANT-LE

A découvrir également LA MISSION DU COMMANDANT LEX d’André de Toth que j’aime davantage à chaque vision. Ce western d’espionnage est superbement dirigé (regardez la scène du tribunal) et donne à Cooper des moments anthologiques.

LA-DERNIERE-CHASSE

LA DERNIERE CHASSE m’a passablement déçu (alors que j’ai été transporté par une nouvelle vision de DEADLINE USA, hélas inédit en dvd) malgré les audaces scénaristiques, les bonnes intentions. J’avais gardé un bon souvenir de ce western écologique, de ce plaidoyer contre le massacre des bisons que Brooks rapprochait du massacre des Indiens. Mais le scénario m’a paru assez lourd et démonstratif et surtout on a l’impression que le film n’est pas monté comme il a été tourné. Il y a des raccords très étranges qui brouillent toute progression dans l’espace, des rapports de plans lourds et maladroits, défauts que l’on ne sent jamais dans ELMER GANTRY ou LES PROFESSIONNELS. Subsistent de belles séquences comme cette bagarre de saloon ni euphorique ni libératrice, désolée plutôt avec ce beau plan de Stewart Granger ivre, un cigare à la bouche, un tesson de bouteille à la main qui fit délirer Jacques Rivette au Studio Parnasse.

AU DELÀ DU MISSOURI est vraiment un film impressionnant. Dans son utilisation de paysages, d’extérieurs somptueux et magnifiquement filmé. Dans ses partis pris notamment  la volonté de faire parler tous les indiens dans leur langue des décennies avant DANSE AVEC LES LOUPS. Et de manière plus compliquée parce que Wellman ajoute le français que parlent les trappeurs canadiens. Adolphe Menjou, qui joue Pierre, passe plus de la moitié de son rôle soit à parler français soit à traduire ce que disent les indiens dans l’une ou l’autre des langues. Il est en effet le traducteur de Gable, lequel ne peut communiquer aux chefs indiens ou sa future épouse qu’à travers un interprète. Autres détails pittoresques, John Hodiak, un trappeur censé connaître plusieurs dialectes a de nombreuses tirades en pied noir et tout le monde chante Alouette, gentille alouette en français (quand vient le tour de Gable, il a un accent prononcé, mais qui est  justifié) On imagine la perplexité des dirigeants du studio devant ces échanges  qui nécessitent tous des sous-titres.. On sent d’ailleurs que le film a été remonté et coupé (il ne dure que 76 minutes) et affublé d’un commentaire hyper insistant qui ne colle pas avec le style dépouillé, elliptique (sauf dans les séquences comiques) de Wellman. Je suis sûr que cette voix-off a été conçue au montage et elle est souvent pléonastique, soulignant des détails qu’on a compris. Comme dans CONVOI DE FEMMES, Wellman laisse de côté certains moments qui se déroulent en partie hors champ ou sont brusquement coupés ou traités en quelques secondes, ce qui provoque une incompréhension chez certains internautes qui regrettent le morceau de bravoure traditionnel. Je ne crois pas que ce soit dans ces moments que le film a été mutilé car ils semblent en symbiose avec d’autres scènes dans de nombreux films du cinéaste.

Il reste néanmoins un grand nombre de plans superbes. Le combat final entre Gable et Ricardo Montalban est impressionnant et l’intrusion de la violence souvent surprenante.

Gable est remarquable et souvent touchant. Je voudrais bien savoir ce qui s’est vraiment passé au montage. J’ai lu que le film avait été autant mutilé que RED BADGE OF COURAGE de Huston

WESTWARD-THE-WOMENQuel plaisir en revanche de revoir un film qu’on a adoré à 18 ans et de constater qu’il est encore meilleur que dans votre souvenir. C’est le cas de WESTWARD THE WOMEN (CONVOI DE FEMMES). Il s’agit d’un des chefs d’œuvres de Wellman et  du western. Il prend le contre-pied d’une des audaces d’OX-BOW INCIDENT. À la quasi-absence de femmes, il substitue au contraire une pléthore de personnages féminins décrits avec le minimum de sentimentalisme, réduit de manière drastique le rôle des hommes, à l’exception de John McIntire, excellent, du savoureux personnage du cuisinier japonais et de Robert Taylor. Ce dernier est  utilisé ici de manière très convaincante (ses plans de réaction quand il découvre les femmes sont cadrés avec une grande intelligence). On retrouve magnifiées, toutes les qualités de Wellman – ton dépouillé, direction d’acteurs et d’actrices extrêmement sobre (Denise Darcel, très sensuelle, est excellente tout comme la gigantesque Hope Emerson), travail impressionnant sur les paysages – toutes les figures stylistiques ou narratives qui portent sa marque : longs travellings qui suivent deux cavaliers de dos, plongées spectaculaires. J’avais gardé depuis la première vision au California, un souvenir vivace des plus beaux plans et de certaines séquences  : les survivantes lançant les noms des femmes qui ont péri, noms que l’écho reprend, la mort d’un enfant, filmé de façon foudroyante. J’ai redécouvert des moments comme cet accouchement dans un chariot que les femmes soutiennent. Séquence ultra wellmanienne montrant que l’individu doit se fondre dans la collectivité. L’action est souvent traitée hors champ : une bagarre très importante est  aux trois quarts occultée derrière des chariots, des obstacles divers ; l’attaque des Indiens qu’on attend depuis le début se déroule hors champ. Robert Taylor et Denise Darcel l’entendent, mais arrivent trop tard. Wellman privilégie, ici comme ailleurs, les conséquences d’une action : ces panoramiques qui recadrent les femmes qui ont été tuées. Et, cerise sur le gâteau, ce western bénéficie d’une absence quasi totale de musique, décision évidente de metteur en scène.

VAQUEROVAQUERO de John Farrow sorti dans la même collection, frappe par sa beauté visuelle. Majestueuse utilisation des paysages (ce grand panoramique découvrant le rassemblement des vaqueros), cadres extrêmement soignés, décors empreints d’esthétisme : le saloon où se déroule le règlement de comptes final. Le scénario de l’excellent Frank Fenton (LE JARDIN DU DIABLE) est complexe, fouillé, flirtant comme souvent chez Fenton avec la fable morale. Son dénouement, vraiment fort, évite tous les compromis. Robert Taylor et Ava Gardner sont bien utilisés, mais Anthony Quinn, étant de brio et de sobriété, vole littéralement le film et son interprétation rachète le choix douteux de Kurt Kasznar (a-t-il jamais joué un rôle correspondant avec sa vraie nationalité ?).

LA-RIVIERE-D-ARGENTCe dernier film comme LA RIVIÈRE D’ARGENT de Raoul Walsh, western sur la volonté de puissance qui, dans mon souvenir, avait des résonances shakespeariennes, une gravité tragique. Je n’ai revu que le début, éblouissant de rythme et d’invention.

En zone 1

On peut commander en zone 1 toi à un prix modique le DVD de THE TRAIL OF THE LONESOME PINE. Le transfert est excellent et j’ai aimé revoir le film que je trouve riche et passionnant quant au talent d’Hathaway. Il utilise brillamment le technicolor qui est d’une beauté à couper le souffle (même si certains maquillages sont forcés). C’est le premier film utilisant ce procédé qui fut tourné en extérieurs. Qui sont d’ailleurs somptueux, admirablement intégrés à l’action. Lyriques ou dépouillés lors de certains moments de violence qui se déroulent souvent parmi des rochers, dans des escarpements qui en renforcent le côté dramatique. Une fois de plus, ce qui frappe chez Hathaway, c’est la netteté aiguë, souvent acérée du découpage qui lui permet de brider le sentimentalisme de cette histoire, déjà gommé dans le scénario de Grover Jones (pour Hathaway le meilleur scénariste avec qui il ait travaillé avec Wendell Mayes).  Et dans la direction d’acteurs chez les personnages âgés notamment. On a un peu de mal au début à accepter les rapports Mac Murray Fonda (dix ans après, on aurait inversé les rôles) mais en fin de compte, je me demande si le choix n’est pas très judicieux même si Mac Murray domine Fonda et paraît plus intégré au décor.

A noter la manière très moderne dont Hathaway termine abruptement certaines séquences, en apparence classiques. Tous les plans de train, d’entrée en gare sont formidables (le retour de Sylvia Sydney) et il se sort brillamment des rapports extérieurs intérieurs, les utilisant pour dramatiser une sortie, un affrontement.

Et il se permet des échappées sentimentales comme ces plans du petit oiseau qui se pose sur différents meubles avant que la caméra panoramique pour recadrer le visage de Sylvia Sidney. On peut regretter deux ou trois gags appuyés avec Nigel Bruce et le petit Bobbie, une bagarre filmée à l’accéléré et la construction dramatique prévisible. Le premier affrontement avec Fonda, en plans larges avec amorce, est spectaculaire. Il est intéressant de comparer l’ouverture de ce film et celle de Sheperd of the Hill (film châtré par le studio selon John Wayne) qui se déroule dans les mêmes paysages et avec le même genre de personnages. Dans les deux films qui mêlent violence et fable morale, l’héroïne féminine échappe aux conventions.

STRANGER-ON-A-HORSEBACKSTRANGER ON A HORSEBACK (VCI entertainment) avait été une des plus heureuses surprises de la rétrospective Tourneur. On avait découvert un film original, d’une légèreté aérienne qui s’impose dès les premiers plans : Joel McCrea chevauchant en lisant en livre de loi passe près d’une tombe qu’on est en train de creuser. Pas de dialogue… juste un léger travelling latéral coupé par un plan serré d’une femme, plan inattendu qui s’enchaîne sur un plan large où McCrea, à droite du cadre, s’éloigne de la tombe. Un  peu plus tard, un chat roux prend une place importante dans le bureau du marshal et sa présence décale les scènes. On le verra sauter du bureau quand trois hommes font brusquement irruption pour délivrer Kevin McCarthy. Ce dernier joue le rejeton du potentat local, rejeté violent, dégénéré, tyrannique et pourtant charmeur qui semble débarrassé de tous les clichés qui alourdissent ce personnage archétypal. Et la manière dont McCrea qui refuse de se servir de ses armes, le réduit à l’impuissance est irrésistible. Il se débarrassera de la même manière d’un homme de main qui le provoque après un échange jubilatoire : l’homme l’arrose quand il passe près d’un abreuvoir. McCrea se contente de dire « il fait chaud ». Quand il revient sur ses pas, l’autre l’arrête : « je n’ai pas aimé ce que vous avez dit » – « J’ai dit qu’il faisait chaud » – « j’ai pas aimé le ton sur lequel vous l’avez dit ». Le ton, le traitement sont constamment inhabituels. McCrea, juge itinérant, découvre presque accidentellement qu’il y eu un meurtre et commence à souligner toute une série d’actes délictueux. Tourneur filme tout cela de manière feutrée, presque dédramatisée : les rapports entre le juge et  John Carradine, procureur corrompu qui essaie de sauver les suspects, sont extrêmement amusants et dégraissés des  effets comiques redondants.

Ce film fut tourné en Ansco Color, procédé étrange qui semble bichrome et donne des teintes étranges (le dvd n’est pas trop mal restauré, mais la copie vue à Beaubourg me semblait plus contrastée) qui dans les plans larges ne sont pas désagréables. Tourneur en tire quelques effets heureux. Comme toujours chez VCI, pas de sous-titres.

Man-in-the-wildernessMEN IN THE WILDERNESS (LE CONVOI SAUVAGE) est un chef d’œuvre méconnu qui est sorti (avec sous-titres français) en double programme avec THE DEADLY TRACKERS de Barry Shear dont j’ai gardé un souvenir détestable bien qu’il ait été commencé par Fuller. Les deux œuvres se partagent la même vedette, Richard Harris qui trouve dans MEN IN THE WILDERNESS l’un de ses meilleurs rôles. Il joue un guide, un trappeur qui accompagne l’expédition du Capitaine Henry (interprété par John Huston). Attaqué par un ours, il est laissé pour mort et abandonné par Henry. Sarafian nous raconte comment il va littéralement renaître, réapprendre à marcher, à survivre et sa lutte pour la vie qui nous vaut de fulgurants plans de nature (thématique qui anticipe sur INTO THE WILD sans le contexte hippie) se double de son désir de vengeance. On pense parfois à MOBY DICK. Photographie inspirée, épique de Gerry Fischer qui culmine dans ces plans de ce bateau que l’on pousse, que l’on tire à travers ces paysages de neige. Un des plus beaux moments, insolite, original, est cet accouchement d’une Indienne auquel assiste Richard Harris. La manière dont Sarafian filme cette scène (et d’ailleurs les Indiens), est exemplaire. À DECOUVRIR ABSOLUMENT.

THE-STALKING-MOONTout comme L’HOMME SAUVAGE (THE STALKING MOON – également sorti en zone 2 en mars dernier) de Robert Mulligan qui est mort fin 2008 dans un semi anonymat. C’était pourtant un cinéaste sensible, attachant qui signa plusieurs œuvres personnelles et originales comme BABY THE RAIN MUST FALL, écrit par Horton Foote, LOVE WITH A PROPER STRANGER, TO KILL A MOCKINGBIRD (DU SILENCE ET DES OMBRES) belle adaptation de l’émouvant roman de Harper Lee qui vient d’être réédité sous le titre Ne tirez pas sur l’Oiseau Moqueur. THE STALKING MOON est un western méconnu, une variation sur le thème des femmes enlevées par les Indiens qui doivent affronter la civilisation. Eva Marie Saint est bouleversante dans ce rôle. C’est aussi un western fondé sur l’angoisse, la peur latente. Les protagonistes sont sans cesse menacés par un ennemi impitoyable et invisible. On ne le devinera que dans les derniers plans. Du coup, on partage l’effroi des personnages, on scrute comme eux les paysages… J’aurais aimé savoir si THE STALKING MOON avait été influencé par l’approche que Val Lewton (aidé surtout par Jacques Tourneur) imposa dans le film d’horreur qu’il renouvela.  On y cachait tout ce que le cinéma d’ordinaire nous montre.

Charles Lang prestigieux opérateur de studio démontre ici qu’il est tout aussi inspiré par les décors naturels. Et l’importance que Mulligan donne aux sentiments, aux émotions, à tout ce qui est suggéré est stimulée par le scénario condensé, le dialogue épuré, laconique d’Alvin Sargent (d’après une adaptation du grand Wendell Mayes).

UP-THE-DOWN-STAIRCASESortons du western pour saluer un autre Mulligan, UP THE DOWN STAIRCASE (ESCALIER INTERDIT), toujours écrit par Alvin Sargent qui annonce de manière incroyablement prémonitoire ENTRE LES MURS de Laurent Cantet. Un double programme serait tout à fait passionnant, même si le Mulligan paraît plus scénarisé. Le regard porté sur l’école, sur les minorités, sur les injustices est le même et UP THE DOWN STAIRCASE annonce tout ce qui arrivera 25 ans plus tard dans l’école française (sous titres français). Sandy Dennis est remarquable.

Sorti d’un coffret distribué par Warner (sous-titres français) qui comprend deux excellents Sturges, ESCAPE FROM FORT BRAVO (magnifique utilisation de l’espace et des paysages) et THE LAW AND JACKE WADE qu’André Glucksmann jugeait Hégélien. Ajoutons pour faire bonne mesure le très intéressant western de Robert Parrish SADDLE THE WIND avec Robert Taylor et surtout Julie London et John Cassavetes. Charles McGraw est impressionnant dans la séquence d’ouverture.

coffret-warner-ESCAPE-FROM

Coffret-Boetticher

Enfin, cerise sur le gâteau, Sony Pictures a enfin sorti (avec sous-titres français) un coffret consacré aux Boetticher avec Randolph Scott, à l’exception du sublime 7 HOMMES A ABATTRE. Je me suis déjà régalé à revoir le magnifique THE TALL T (d’une rare violence et où Maureen O’Sullivan campe le plus intéressant personnage de femmes de cette série, avec Gail Russell dans  7 HOMMES). Scott, dans les premières scènes sourit beaucoup et joue avec une décontraction absente des autres œuvres. Ce qui rend l’irruption de la violence encore plus forte, plus troublante. COMANCHE STATION, RIDE LONESOME sont tout aussi remarquables avec cette flopée de hors la loi savoureux, souvent minables, illettrés, obsédés par les femmes et qui ont dû beaucoup inspirer Quentin Tarentino. Transfert magnifique et analyse parfois sommaire de Clint Eastwood et Martin Scorcese.

ARROWHEAD

Nous étions trop sévères dans 50 ANS DE CINEMA AMERICAIN pour ARROWHEAD (LE SORCIER DU RIO GRANDE) écrit et réalisé par Charles Marquis Warren que j’ai revu avec un grand  plaisir. On soulignait, à juste titre, l’interprétation spectaculaire de Jack Palance (son arrivée dans le film est mémorable  tout comme le moment où il retrouve son père) mais il aurait aussi fallu louer Charlton Heston (aussi puissant que dans NAKED JUNGLE) qui jamais n’édulcore, n’affadit la violence noire, la rage haineuse du personnage. Certes le discours du film peut paraître quelque peu univoque.

Tous les Apaches  sont cruels et l’on ne peut leur faire confiance surtout pas à ceux qui semblent civilisés : l’une des premières actions de Palance/Toriano  est d’abattre son frère de sang, le scout indien est un traître.  Mais néanmoins, le propos témoigne d’une certaine complexité, supérieure à la moyenne des westerns, évite le manichéisme « noble sauvage méchant civilisé » ou l’inverse, les Apaches sont ce qu’ils sont et font ce qu’ils font (« That’s what they do ») et pareil pour les blancs, militaires ou autres. Tout le monde a ses raisons, bonnes ou mauvaises (et souvent les deux selon le point de vue). Heston qui a vécu avec les Apaches dit bien comme Lancaster dans ULZANA’S RAID (FUREUR APACHE) qu’il ne déteste pas les Apache, simplement qu’il les connaît mais le film n’atteint pas la complexité de l’Aldrich dont il constitue une sorte d’ébauche. Le rapport avec ULZANA’S RAID est plus sensible, comme nous le soulignions, dans le beau  roman de Burnett. Je n’irai plus jusqu’à dire que Charles Marquis Warren le trahit honteusement. Plutôt qu’il l’édulcore, l’affadit. Le livre est essentiellement une longue et aride traque menée par le héros et un groupe de scouts indiens. On ne voit jamais Toriano contrairement au film, sauf quand on le tue.

Et  pourtant la violence du ton détonne et étonne. Warren recycle certaines idées de  l’excellent et original LITTLE BIG HORN : un soldat  cloué contre un  arbre par trois flèches, les deux ou trois plans de massacre filmés à la grue, Heston qui noie un Apache de ses mains. La photo couleur  pourtant bonne de Ray Rennahan rend ces moments moins cinglants que le noir et blanc austère de BIG HORN. On retrouve aussi des péripéties d’ONLY THE VALIANT (les soldats qui se font tuer un par un) dont Warren avait écrit le scénario. Ed Bannon (dans le livre, il s’appelle Grein), ce scout inspiré dit le dernier carton d’Al Sieber (le  mystérieux  texte qui ouvre le film ne prend qu’ici tout son sens) est un personnage récurrent du cinéma américain : l’homme d’action,  de guerre qui connaît le terrain et qui a souvent, presque toujours  raison contre les bureaucrates, les humanistes. C’est le petit cousin  du sergent Croft des NUS ET LES MORTS, de Montana dans COTE 465, du Lancaster de ULZANA’S RAID. La franchise du ton est à porter au crédit du film. Elle traduit une réalité historique, idéologique que certains westerns progressistes n’ont pas osé aborder. Des  personnages comme Bannon ont dû peupler l’Histoire de l’Ouest. On retrouve d’ailleurs Al Sieber sous les traits de John McIntire dans APACHE d’Aldrich, tourné la même année et où il est montré de manière plus sympathique. Robert Duval le joue dans l’intéressant GÉRONIMO de Walter Hill et Burt Lancaster interprète un personnage ouvertement basé sur Sieber dans ULZANA’S RAID. Etudier ces 4 films est une bonne approche transversale du genre.

Ajoutons que Warren montre deux ou trois fois l’étroitesse d’esprit, l’obstination stupide de certains officiers et un sens de l’honneur chez les Apaches. Mais contrairement à Aldrich, Mann, Walsh, il n’ouvre jamais  son propos, ne le met pas en perspective, ne le soumet à aucune  contradiction. Et pourtant il s’en faut de peu pour qu’une autre signification apparaisse grâce d’abord à Jack Palance. Son personnage  ressemble à ces révolutionnaires qui sont revenus galvaniser leurs  peuples après avoir fait des études chez le colonisateur. Et la  manière dont Warren commence à filmer ce qui s’apparente à une  déportation pourrait, avec un très léger écart de perspective, s’apparenter à BRONCO APACHE (Palance dénouant ses cheveux est  inoubliable dans cette scène). Il y a aussi plusieurs échanges qui ont un côté fullerien (les  dialogues sont d’ailleurs assez efficaces) et l’excellent Brian Keith joue un personnage d’officier humain assez proche de celui du JUGEMENT DES FLECHES.

Et puis c’est un des derniers westerns (un des derniers films) en 1:37: 1. et j’aime de plus en plus revenir à cet  aspect ratio.

HELLGATEAprès la réévaluation d’ARROWHEAD, déception avec la vision de HELLGATE (dvd VCI sans sous-titres avec 5 autres titres dont PANHANDLE de Lesley Selander) variation assez biscornue sur THE PRISONNER OF SHARK ISLAND. Toute une partie du film possède des défauts que l’on retrouve dans plein de films de Marquis Warren : décors approximatifs (comme dans 7 ANGRY MEN ou TROOPER HOOK) ou bâclés (dans le premier tiers, la maison de Sterling Hayden, le tribunal militaire), raccords médiocres, découpage souvent très maladroit, utilisation de l’espace peu effarante : des personnages qui devraient être vus de très loin surgissent tout à coup, des indiens apparaissent au milieu d’un plan. Pourtant le lieu où se passe une partie du film parait prometteur : cette prison dans une immense grotte au fond d’un canyon et parfois Warren en tire quelques beaux effets : une bataille dans une tempête de sable, la mort d’un prisonnier qui essaie d’escalader une paroi très en pente. On est certes dans un lieu insolite mais on ne sent ni l’usure du temps, ni les blessures, ni la fatigue. L’arrivée du héros qui surprend des civils réfugiés derrière une barricade est filmée comme dans les plus mauvaises séries Z dans un décor absolument nul. L’interprétation est très pauvre quand on la compare avec LITTLE BIG HORN ou ARROWHEAD. Hayden est spécialement maladroit malgré les renforts de barbes et de poussière mal collée et James Arness n’est guère plus convainquant. D’autres petits rôles sont totalement falots. Le seul à tirer vers la fin son épingle du jeu sont Ward Bond et Joan Leslie.

Westerns rares et curiosités

Je viens de voir PANHANDLE sorti par VCI (sans sous-titres) écrit et produit par Blake Edwards et John C Champion. Edwards joue le rôle d’un jeune tueur à gages, Floyd, (qui dit au héros : « vous être un homme important, Mr Sands. Très poli envers les gens célèbres »). Dans la distribution, on trouve déjà Dick Crockett que l’on retrouvera dans nombre de films ultérieurs d’Edwards. PANHANDLE est une bonne surprise, surtout venant de Lesley Selander. Le découpage m’a paru moins routinier que d’habitude, dans ce que je connais de lui ; les extérieurs filmés à Lone Pine, sont bien choisis, avec un grand nombre de plans larges, soigneusement cadrés. Certains moments nocturnes, une embuscade en particulier, témoignent d’une vraie recherche visuelle qui évoque certains de Toth. Et le scénario dissémine ici et là de plaisantes et rafraîchissantes surprises : Rod Cameron,   lequel joue un peu comme Scott chez Boetticher, doit s’enfuir sans sa selle et passe son temps à essayer d’en retrouver une. Floyd vient le provoquer dans le saloon. On croit qu’on va avoir droit à l’habituelle bagarre mais Cameron lui lance son revolver dans le ventre, ce qui le cloue en deux et l’arrête net. On pense avoir échappé à la bagarre, mais elle éclate le plan suivant, dure très longtemps, les deux combattants passant même à travers la vitre du saloon et s’empoignant dans la rue, en pleine nuit. Sands raconte au jeune tueur médusé comment il s’est battu contre Billy Le Kid et se tait quand il en arrive au moment décisif. Floyd  demande anxieusement : « Et qu’est ce qui s’est passé? »  – « Il m’a tué », répond Sands en quittant la table.

Nous avons droit au plan final archétypal : le héros s’éloigne vers l’horizon. Sauf qu’il est à pied et qu’il pleut des cordes. La pluie nous vaut un échange très amusant avec Reed Hadley : « Quand il pleut qu’est ce que vous faites » – « Je vais à l’intérieur ». Tout cela porte la marque d’Edwards.

Prologue inconnu et perdu d’un film de Leone

A-FISTFUL-OF-DOLLARSDans les bonus du dvd américain de A FISTFUL OF DOLLARS, on trouve un prologue filmé pour la distribution aux USA, surtout à la télévision, qui était destiné à donner une motivation morale aux meurtres commis par Eastwood. Lequel tuait plein de gens, sans remords ni explication.

Ce prologue fut filmé au Mexique par Monte Hellman et joué par Harry Dean Stanton qui parle à une doublure d’Eastwood. Monte est interviewé et raconte qu’Eastwood aurait dit : « c’est curieux, je ne me souviens pas avoir joué cette scène ». Découverte marrante.

Je ne comprends rien à la politique d’Universal et je ne vois pas ce qui a pu présider au choix de A L’ASSAUT DU FORT STARK de George Sherman, western platounet, sorti dans un transfert médiocre et un format discutable. La photo de William Daniels m’a semblé des plus routinières. J’avais été très heureusement surpris par les recherches, l’invention de la mise en scène de Sherman dans AU MEPRIS DES LOIS. Et dans d’autres film inédits en dvd, BLACK BART, WHISPERING CITY, DUEL DANS LA SIERRA, SWORD IN THE DESERT. Rien de tel ici. Le meilleur plan est celui qui suit immédiatement le générique. Le reste est routinier, dans des extérieurs monotones, peu excitants (contrairement à ceux d’AU MEPRIS DES LOIS). Les personnages se dissimulent derrière des buissons squelettiques, face à deux cents indiens et tout est à l’avenant.

L ASSAUT DU FORT STARK

Il n’est que de regarder le fulgurant début de A KING AND FOUR QUEENS de Raoul Walsh, avec ces fantastiques plans de chevauchée, ces surgissements sur une crête, ces descentes sur des à pics.

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Commentaires (186)

 

  1. Alexandre Angel dit :

    Le numéro de Positif de septembre 2020 met Robert Mulligan à l’honneur.
    Je viens de revoir THE STALKING MOON dont je découvre les richesses un peu plus à chaque nouvelle vision. Et juste après, j’ai lu, dans le dossier en question, ce qu’en écrit Floreal Peleato. Eh bien, c’est un très beau texte, que je conseille ardemment tant il reflète très exactement les sentiments qui m’ont traversé en cours de (re)vision du film quant à l’âpreté, le mutisme, la mélancolie sourde, l’équilibre trouvé par Mulligan entre introversion et énergie. Peleato analyse merveilleusement bien d’étonnants mouvements d’appareil qui épousent, avec une virtuosité discrète, le bagage du personnage de vieil éclaireur qu’incarne avec une économie de moyen remarquable Gregory Peck (qui annonce Burt Lancaster dans FUREUR APACHE) qui nous fait sentir l’expérience, l’instinct, le sens du terrain. Mais surtout Peleato met le doigt sur les mille et uns stigmates formels du film qui trahisse la sensibilité et la pudeur du réalisateur. Pudeur parfois écorchée qui raisonne avec celle du scénariste Alvin Sargent, dont j’apprends que le père s’était suicidé.
    Alors dans la foulée, j’ai revu THE OTHER, qui est peut-être un chef d’oeuvre.

    • yves rouxel dit :

      A alexandre.Dans un autre registre »The auther »est un film étrange sur la conception des personnages énigmatiques.La force du cinéma de Mulligan vient avant tout de la sensibilité de l’homme qui aborde de façon touchante et sans pathos la psychologie des protagonistes.Il s’interroge beaucoup à travers les personnages qu’il dépeint. »Un été 42″est une oeuvre que je revois souvent pas à cause de la bande musicale signée par Michel Legrand mais pour ses souvenirs de fin d’adolescence ou l’on se rappelle des bons moments que l’on à vécut à l’aurore de l’age adulte.Très bon dossier dans le dernier Positif.Pourtant il n’existe aucun ouvrage consacré à ce cinéaste un peu à part.Esperons qu’un jour quelqu’un se penche sur son oeuvre!!!

    • MB dit :

      à AA vous nous direz pour THE OTHER, que j’avais trouvé un peu facile. Je suis d’accord sur STALKING MOON, dont les 5 premières minutes au moins sont impressionnantes . je revois ce film tous les 3 ans je crois. Pour compléter la connaissance de Mulligan on a un dvd récemment de BABY THE RAIN MUST FALL/LE SILLAGE DE LA VIOLENCE que je n’ai jamais vu, quand au film avec la magnifique Sandy Dennis qui se passe dans un lycée on l’espère encore , il n’est qu’en zone 1: ESCALIER INTERDIT que j’ai vu il y a 50 ans! UNE CERTAINE RENCONTRE a été visible sur une chaîne de ciné (avec McQueen qui joue un Italien!).
      merci de vous concentrer sur le cinéma plutôt que sur un certain bloggeur qui accumule les critiques à mon sens, superflues.

      • MB dit :

        MULLIGAN j’oublie TO KILL A MOCKINGBIRD/DU SILENCE… qui est un chef d’oeuvre dont Bertrand a déjà parlé et Mathieu aussi, UN ETE EN LOUISIANE est très séduisant (Waterston excellent), Rouxel je ne vous suis pas sur UN ETE 42 qui est vraiment complaisant. THE NICKEL RIDE est un peu austère à mon goût et l’acteur principal souffre de cette austérité, DAISY CLOVER est un peu faible et conventionnel mais faudrait le revoir.

        THE NICKEL RIDE n’est-il pas un remake de THE GANGSTER?

        • Bertrand Tavernier dit :

          A MB
          UN ETE 42 est un tantinet complaisant et académique. Le scénario de THE NICKEL RIDE, film sans doute trop austère mais que j’aime infiniment plus, présente en effet d’étranges parentés avec THE GANGSTER qui lui, est une adaptation assez fidèle, d’un beau roman de Daniel Fuchs, la deuxième ou troisième partie d’une trilogie dont on n’a traduit en France que la première (chez Joelle Losfeld)

        • MB dit :

          à Bertrand: dans NICKEL RIDE c’est sans doute pour briser un peu l’austérité d’un polar ou film noir que Mulligan a introduit ces scènes brutales où le héros en fait, rêve qu’il est attaqué, mais certains ne sont pas gênés par elles (Film Noir de Silver & Ward, mais le bouquin est surtout valable pour ses génériques et résumés, ses visions critiques s’envolent parfois dans la nébuleuse de la thématique du « noir »), je trouve que là, Mulligan s’est planté?
          A relire le résumé de GANGSTER de G Wiles, les similarités avec NICKEL me paraissent en effet lointaines, j’ai dû entendre qqn parler de remake.
          Le bonus du bray de TO KILL contient un doc passionnant sur le film + une interview de Mary Badham très émouvante (par contre il y a aussi un doc hagiographique sur Gregory Peck dont on peut se passer, on a droit à l’accouchement du bébé de sa fille!….).
          à AA je vais revoir L AUTRE dans de meilleures conditions qu’un dvd ancien.

        • Bertrand Tavernier dit :

          A MB
          Il y a quand même de vraies ressemblances entre les deux films

      • Alexandre Angel dit :

        A MB et Yves Rouxel,
        Je n’ai pas un super souvenir du SILLAGE DE LA VIOLENCE. Je n’avais pas trouvé Steve McQueen très bon (ai-je tort?).
        Mais THE OTHER est un modèle de film fantastique protégé, extirpé même, de toute mode. On pense rétrospectivement à THE OMEN notamment par la « faute » de Jerry Goldsmith, sauf que le film de Mulligan est totalement souverain en son royaume, dénué d’effets horrifiques (à part le surgissement d’un monstre de foire mais c’est aussi l’imaginaire forain de cette séquence qui le veut).En bonus, le réalisateur Pascal Laugier, tout à fait captivant sur le film et sur Mulligan en général, explique bien (attention car je divulgue un peu!) comment l’utilisation de vrais jumeaux est un signe d’intelligence logistique qui permet au réalisateur de faire des économies(pas besoin de multiplier les prises de vues avec le même acteur qui se répond à lui-même) tout en jetant un trouble sur la perception du spectateur.

      • Mathieu dit :

        Mulligan est un metteur en scène que je connais pas suffisamment (je n’ai pas vu THE NICKEL RIDE malheureusement, ni THE STALKING MOON, que Warner a récemment réédité en Blu-Ray dans sa collection Archives) mais il m’a déçu deux fois à la deuxième vision, pour THE OTHER et TO KILL A MOCKINGBIRD. Ce dernier je le verrais bien une troisième fois mais THE OTHER m’a paru trop artificiel, trop fabriqué à la revoyure (et en plus je n’ai pas trop aimé le (les?) jeune acteur). Quant à INSIDE DAISY CLOVER, je l’ai abandonné en cours de route, ne supportant pas le jeu de Nathalie Wood (mais pas que). Je me demande si Mulligan est un très bon directeur d’acteurs (Nathalie Wood, Brock Peters qui en fait des tonnes je trouve dans TO KILL…)

        • Bertrand Tavernier dit :

          A Mathieu
          Vous être trop sévère. Les enfants sont très bons dans TO KILL et beaucoup d’autres acteurs aussi, tout comme Sandy dennis dans ESCALIER INTERDIT. Je n’vais jamais été totalement convaincu par THE OTHER ni par INSIDE DAISY CLOVER qui a aussi ses partisans

        • MB dit :

          MULLIGAN c’est une carrière très inégale mais j’avais compris Mathieu que vous adoriez TO KILL? Je ne sais pas pour Brock Peters si ce n’est pas justifié par son personnage plutôt, qui doit manifester cette raideur. A la revision UN ETE EN LOUISIANE tient très bien le coup et j’ai vu que Sam Waterston, qui disparaît un peu sous un physique passe-partout, est capable de faire oublier ça en faisant passer plein de choses comme Coëdel dans SORTILEGES que viens de voir (sa réaction silencieuse lorsque Reese Witherspoon lui dit qu’elle ne lui en veut pas de l’avoir punie que c’était parce qu’il était inquiet! le laconisme peut dire plus!) d’ailleurs je me suis retapé les cinq premières saisons de LAW AND ORDER/NEW YORK DISTRICT pendant le confinement, et Waterston jouant l’assistant au D.A. a des trouvailles de comportement et des envolée de paroles tt à fait singulières, et crédibles.

        • Bertrand Tavernier dit :

          A MB
          En tout cas Reese Whiterspoon ne tarissait pas d’éloge sur Mulligan, en parlait comme un directeur d’acteurs très sensible qui lui avait tout appris et elle avait tenu à faire son éloge funèbre

        • MB dit :

          « En tout cas Reese Whiterspoon ne tarissait pas d’éloge sur Mulligan, en parlait comme un directeur d’acteurs très sensible qui lui avait tout appris et elle avait tenu à faire son éloge funèbre »
          je comprends elle est très bien dirigée dans ETE EN LOUISIANE et il faut la voir dans ELECTION et bien sûr BIG LITTLE LIES, elle est capable de jouer des personnages contrastés.

        • MB dit :

          « A Mathieu
          Vous être trop sévère. Les enfants sont très bons dans TO KILL et beaucoup d’autres acteurs aussi, »
          je suis d’accord, il faut bien regarder le jeu de la voisine de Peck, celui de la servante Calpurnia, qui s’occupe de la maison et Mary Badham excellente masque aussi son frère (Philip Alford) et le voisin John Megna qui est inoubliable.

        • Mathieu dit :

          A Bertrand:
          D’accord pour les enfants dans TO KILL… qui sont très bons tous les trois.

        • Mathieu dit :

          A MB:
          J’ai adoré TO KILL… autrefois, beaucoup moins à la deuxième vision. J’en ai parlé assez récemment au sujet du mythe américain du « white trash » dont le roman de Harper Lee ainsi que le film de Mulligan offrent un exemple archétypal avec la famille Ewell.

  2. SERVANT Jean-Pierre dit :

    Découverte avant hier en salle d’un film de Robert Mulligan que je n’avais jamais vu, LOVE WITH THE PROPER STRANGER (« UNE CERTAINE RENCONTRE »), réalisé en 1963, avec Natalie Wood, Steve McQueen, Tom Bosley et Hershell Bernardi. J’avoue être sorti de la salle, émerveillé par ce petit bijou d’intelligence, de fraîcheur et admirablement interprété.

    Ils ont eu une aventure sans lendemain.Elle lui annonce qu’elle est enceinte et lui demande de l’aider à trouver un médecin pour avorter. A partir de là Mulligan raconte une histoire d’amour sans sensiblerie, mais juste, avec les interrogations de ces deux personnages confrontés à un événement particulier. Vont-ils se trouver ?

    Beaucoup d’extérieurs dans New York, une photographie noir et blanc formidable de Milton Krasner- d’autant que le film est restauré pour cette ressortie en salles – pour un film qui alterne entre le sombre (la scène où Natalie Wood, accompagnée de McQueen, se rend dans un appartement sordide pour rencontrer le « médecin » avorteur), et le léger dans quelques scènes éparses au long de l’histoire et la dernière partie du film. La fin, dans une rue semble avoir été filmée en style « caméra cachée », tant les passants semblent surpris par Wood et McQueen.
    Très belle musique d’Elmer Bernstein.

    Mulligan aime ses personnages c’est évident. Il se dégage de ce film une telle tendresse, une telle pudeur. J’ai été scotché à l’écran pendant les 110 minutes de projection. Natalie Wood, magnifiquement photographiée par Krasner (les gros plans superbes !) et Steve McQueen avaient là deux rôles formidables. Curieusement j’ai lu – après avoir vu le film – que la critique américaine (une partie ?) n’avait pas trouvé ce film très intéressant dans leurs carrières.

    Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi ce film n’avait jamais été représenté depuis sa sortie française en 1964. Bien entendu cette ressortie en salles me fait vivement espérer une édition vidéo prochainement.

    • Alexandre Angel dit :

      A SERVANT Jean-Pierre
      …film dont j’ai loupé l’unique projection en salle, dans ma ville. Je m’en veux encore plus..

      • SERVANT Jean-Pierre dit :

        A Alexandre : ah oui c’est vraiment dommage. J’ai eu de la chance, à Bordeaux le circuit Utopia le présente plusieurs jours de suite.

  3. MinettePascal dit :

    Apparemment, on ne parle pas de DISTANT DRUMS sur le blog, ou bien ai-je mal cherché, ce qui est le plus vraisemblable.
    J’avais peur de le revoir mais les Séminoles ne sont pas les moins effrayants des Indiens de cinéma. Les plans où ils se mettent à courir sont impressionnants et physiquement, ils m’ont rappelé l’horrible petite momie des Sept Boules de Cristal.
    Côté scénario, les rapports de contrastes et de miroir entre la vie de Wyatt et de la petite dame donnent du piment, ainsi que le flou entretenu dans l’évocation des sentiments éprouvés par chacun d’eux.
    Walsh détend le climat par un long plan montrant Cooper se rasant ( sans se cooper) avec son poignard alors que les deux témoins perplexes font des efforts désespérés pour entretenir leur conversation.
    Bon, le narrateur n’a pas une vraie consistance, ni le soldat qui se sacrifie à la fin et qu’on aurait aimé mieux connaître.
    Ce film m’a ravi de toutes façons, je ne sais pas s’il a bonne réputation ici ?

    • Bertrand Tavernier dit :

      A MinettePascal
      C’était un film culte pour certains et je l’avais adoré dans mon adolescence. On n’en a pas parlé parce qu’il était très difficile à revoir et que les premiers dvd étaient très mauvais et ne rendaient pas compte des couleurs spectaculaires du film (qui sont toutefois trahies par l’intrusion de stock shots de médiocre qualité qui alourdissent le propos). Le scénario est un remake d’OBJECTIVE BURMA et j’ai été un des premiers à le remarquer et il est nettement inférieur à l’original de même que l’écriture des personnages, si tendue dans BURMA. Seul apport l’intrigue amoureuse avec Mari Aldon qu’on revit. Je vais revoir ces scènes car je crois qu’il y a un DVD correct. La scène du rasage est anthologique et je connais des gens qui ont essayé d’imiter Cooper et qui se sont atrocement écorché. Visuellement le film avait un grand impact mais je doute qu’il s’élève au niveau de PURSUED même si c’est ce que l’on pensait à l’époque

      • MinettePascal dit :

        Merci pour cette longue réponse et pour les deux autres films que vous citez, vers lesquels je vais sans délai tendre ma curiosité.
        Dans DISTANT DRUMS, il y a aussi Arthur Hunnicut, dans un rôle et un costume qui pourraient être ceux du Bugle d’EL DORADO ,dix ans plus tôt.

        • MinettePascal dit :

          A MB : Vous, si vous passez par là, restez tranquille. EL DORADO, c’était juste en passant !

      • Alexandre Angel dit :

        A MinettePascal et Bertrand,
        DISTANT DRUMS est un film d’aventures magnifique (même si des défauts, ou des insuffisances, peuvent se révéler) que j’ai eu la chance de voir deux fois en salle.
        Mais il fait partie de ces films que le marché du dvd et du blu-ray, pour des raisons X ou Y, néglige (sujet qui ne me voit jamais décolérer : on a pas l’impression, avec la musique et la littérature, d’être privé d’accès aux oeuvres, alors qu’avec le cinéma, c’est la loterie totale). DISTANT DRUMS devrait depuis belle lurette côtoyer d’autres classiques de Walsh sur nos étagères, sauf que non.

        • Bertrand Tavernier dit :

          A Alexandre Angel
          C’est juste une question de droit. Il faisait partie d’un petit groupe de films qui fut vendu à la Republic et qui disparurent quand le catalogue Republic fut repris par Paramount. TCM l’avait programmé dans un hommage à la Republic qui n’a rien eu à voir avec la production de ce film

    • MB dit :

      à M Pascal: dites-nous votre dvd la qualité svp? Edition française zone2?
      du coup ça me donne envie de revoir BURMA…

      • MinettePascal dit :

        A MB : Peux pas vous répondre là-dessus, je l’ai vu via youtube branché sur la TV.
        Je sais c’est sacrilège, triste et blasphématoire mais sinon, je ne verrais pas de films.
        Sur le Capitaine WYATT, il faut aussi applaudir au boulot de Max Steiner, capable de tout commenter (trop ?), et même quelques mesures pas si éloignées du Williams de JURASSIC PARK.
        Mais le silence et l’écho lointain des tambours inexorables sont insurpassables…

        • Bertrand Tavernier dit :

          A MinettePascal
          J’ai beaucoup de mal à entendre cela. Comment osez vous parler d’un film que vous voyez dans une copie archi pourrie. C’est impossible de juger le film. Les balances de couleur sont constamment trahies, tout est tiré hyper clair. En outre vous violez les droits d’auteurs (un accord a été trouvé ces jours ci avec You Tube en France mais pas pour les films américains). Il vaut mieux ne pas voir un film et attendre deux trois ans qu’il sorte dans des conditions décentes, ce qui va arriver. Le tout tout de suite est une philosophie que je déteste et qui permet aux multinationales de nous piller, de piétiner nos droits. Moi, j’ai choisi de ne pas revoir le film et de me concentrer sur les Walsh retrouvés, restaurés qui sortent dans de meilleures conditions à un prix souvent décent

        • ballantrae dit :

          D’accord avec vous Bertrand: voir dans de très mauvaises conditions un film est pire que de voir attendre.La dernière fois que j’ai tenté le coup c’était l’an passé pour Mountains of the moon de Rafelson car je voulais vérifier les éventuelles ressemblances avec Lost city of Z: j’ai retrouvé le récit, des plans , des dialogues mais bien loin était le plaisir de la salle en 1990 puis de la diffusion tv vers le milieu des 90′.
          Désormais, je préfère attendre plutôt que réitérer l’expérience sur internet…

        • MB dit :

          ouais… faudrait pas qu’on meure avant d’avoir revu PURSUED.

      • MB dit :

        AVENTURES EN BIRMANIE: je viens de le commander, d’après Dvdbeaver, la qualité d’image est « very strong »

  4. MB dit :

    à propos de LA FILLE DU BOIS MAUDIT, très beau titre qui n’a rien à voir avec THE TRAIL OF THE LONESOME PINE, et que Bertrand plus A Angel (je ne retrouve pas où?) m’ont poussé à découvrir je voudrais juste isoler le chien des Tolliver. Le mystère du regard de certains chiens ne fascinent pas que les habitués de 50 MILLIONS D AMIS (qui a vécu ses derniers jours pour cause de « vieillisme »).
    Le chien a droit à quatre plans: lors du retour de Sylvia Sidney à la maison, bouleversée par sa rencontre avec MacMurray il se planque sous une table pour l’observer assez fataliste quant à ces émois (12’20)
    il regarde le téléphone qui pend abandonné au bout de son cordon, alors que Sidney qui téléphonait à MacMurray apprend ainsi indirectement la mort de son petit frère(1h17)
    lors de l’enterrement du gamin, il s’approche en rampant pour observer la réunion des humains de loin (1h24)
    à la toute fin, il est cette fois-ci réuni à l’homme qui chante et le prend sous son bras pour l’étreindre alors que tous deux observent le paysage, alors qu’on les voit de dos.
    J’ai trouvé dans le regard sur ce chien un point de vue grave qui tient du fatalisme de la compassion et bien sûr d’une infinie tristesse très mystérieuse, le point de vue de Hathaway?
    L’image est tellement chouette qu’on dirait du hd mais qqn m’expliquera pourquoi le générique est en N&B?

    • Alexandre Angel dit :

      A MB,
      C’est la 1ère fois que je m’exprime sur ce film, en fait (j’imaginais juste qu’il ferait bon double programme avec LES GARS DU LARGE). Sauf qu’il faudrait que je me rafraichisse un peu la mémoire. Je trouve qu’il partage avec ce dernier un sens très mâture du récit, sans intermèdes comiques bêbêtes. Dans les deux films, il y a une chaleur humaine, un respect des personnages, une âpreté aussi un peu écorchée vive, avec de l’émotion mais rien de dégoulinant. Surtout LA FILLE qui émeut, d’une façon inattendue. (Attention spoilers) Le chien participe de cette tonalité, notamment lors de la mort de l’enfant, qu’une distance téléphonique séparant Sylvia Sidney de la scène du drame rend d’autant plus émouvante (plan du combiné qui se balance sur fond de hurlement du chien).
      Ce que je retiens aussi de LA FILLE est le look du village (lorsque village il y a) vaguement aggloméré, comme ça, avec des bicoques qui voisinent plus ou moins comme le feront celles du PASSAGE DU CANYON, quelques 10 ans plus tard.

      • Alexandre Angel dit :

        Je dis « attention spoilers » alors que vous décrivez la scène. Gland je suis..

        • MB dit :

          Vopus me faites penser que le village est très vraisemblable, je ne sais pas à quoi ça tient et oui, il rappele celui de PASSAGE DU CANYON. Je croyais que vous en aviez parlé plus longtemps de ce film, mais Bertrand en parle sous son titre original.

        • MB dit :

          y’a pas spoiler c’est pas un détail d’intrigue qui volerait le plaisir du spectateur de le découvrir (style: c’est le majordome le meurtrier!). Détail: le chien regarde ailleurs et il doit être appelé par le dresseur pour détourner la tête sur le combiné! Mais il ne hurle pas, il reste silencieux! bon allez, on en reparlera quand vous reverrez le film éventuellement!…

  5. MB dit :

    Je me demande si THE LAW AND JAKE WADE ou LE TRESOR DU PENDU n’est pas le western le plus pur que j’ai vu, exactement ce que Bazin disait de 7 HOMMES A ABATTRE si on isole « le plus simple et le plus beau ». Tout ce qui est extérieur à l’intrigue est éliminé et tout ce qui ressort de l’intrigue est traité avec sérieux et dignité, sans tentative de morceau de bravoure. La souplesse de Wydmark, le meilleur acteur américain des 40 50 60 (cf le très juste hommage rendu par Brion dans le bonus de DESTINATION GOBI, cette pépite de Robert Wise) l’intelligence de seconds rôles aussi concernés par le projet que Robert Middleton ou Henry Silva, tous deux rarement aussi bons, la sérénité dans laquelle baigne l’entreprise. Même un vieux routier de 2nd rôle comme DeForest Kelley qui est un peu sacrifié avec un rôle rare en répliques, reste terriblement convaincant! Je retire sans méchanceté la vedette féminine, un peu absente et Robert Taylor pas qu’il soit mauvais mais il est face à Wydmark alors… John Sturges complètement inspiré (ce cinéaste est un mystère comment peut-il tourner LE TRESOR avec autant d’inspiration, et GUN HILL avec aussi peu? pardon Minette Pascal) inspiré par le scénario de William Bowers bien sûr. J’ai vu le film deux fois à deux soirs d’intervalle pour être sûr. Le scénario dépouillé ne peut seul causer la réussite du film, Sturges parvient sans génie mais par patience, par respect pour le film à instituer un rythme tranquille (on n’est pas dans les cavalcades de M Curtiz ou Walsh!), pour une sorte de ballade meurtrière fataliste: on voit là ce petit groupe qui sans se presser, finalement marche vers une possible mort comme avec reconnaissance, dans des paysages magnifiques mais aussi Sturges arrive-t’il parfois à morceler ce paysage avec bonheur pour en faire des bouts de décor ainsi ces cavaliers qui contournent une mare dans le premier tiers, l’homme est aussi un esthète grâce au cadre et au montage. Sturges sentit bien les implications de Bowers car dans le bouquin de E Laborie il les théorise et les pousse à fond, expliquant l’énorme sentiment de trahison de Wydmark lié à son admiration déçue pour Taylor qui l’a abandonné et qu’il retrouve fiancé, son désir de mourir de la main de Taylor (il se rend étrangement passif vers la fin devant pourtant se douter que son ancien ami a caché une arme) et même le duel final vu au ralenti, révèle bien une attente de Wydmark que Taylor tire le 1er! A côté, des clichés sont vite oubliés: ces Comanches qui se débrouillent toujours pour se détacher en silhouette sur le ciel en cible parfaite, ces coups de feu à la volée qui font mouche, une musique un peu trop présente et encore Sturges dit-il qu’il a refusé la chanson de Frankie Laine. Le film pourrait s’intituler « Petite ballade meurtrière ».

  6. Minette pascal dit :

    Sur Richard Harris, on devine quelqu’un qui a dû travailler sa présence et son jeu pour devenir bon.
    J’avoue être parfois agacé par son expression dans « Un homme nommé cheval » mais il fait du bon boulot dans « Les Révoltés du Bounty » ou « Impitoyable ».
    Je suppose qu’il y avait un risque à lui donner le rôle principal dans ORCA, mais il y est surprenant dans certaines scènes.

  7. Alexandre Angel dit :

    Je viens de revoir VAQUERO à la lumière de cette chronique et le lointain souvenir que j’en avais (chez Monsieur Eddy) auquel s’ajoute la vision de ce dvd en 2007 s’en trouvent ravivés. Par moment, le film inquiète un peu : Ava Gardner et Howard Keel ont ce côté un peu statufié de bons nombres de silhouettes MGM. Certaines scènes d’action sont, de plus, réalisées sans trop d’inspiration (l’attaque nocturne du ranch d’Howard Keel) mais Robert Taylor est bien, Anthony Quinn sensationnel et l’ensemble est bien écrit, avec des enchaînements stylés (la gifle que Rio donne à Ava Gardner déclenchant l’accord de guitare qui introduit la chanson de la séquence suivante). Un seul hic mais de taille : les couleurs que présente ce dvd Warner sont absolument dégueu. Alors je pose la question suivante : le générique présentant le label Ansco Color, a-t-on à faire aux vraies couleurs du film ou bien à une copie honteuse qui défigurerait la beauté visuelle vantée par Bertrand?

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